Cet enfant/adulte s'auto-mutile

TENTATIVES D'EXPLICATION

Il y a différentes lectures actuellement à propos de l’auto-mutilation. L’approche sensorimotrice d’André Bullinger nous apporte un éclairage très intéressant.

  • L’image corporelle nécessite des capacités de représentation, un sentiment d’unicité, liés à un traitement harmonieux des flux sensoriels.
  • Chez la personne en situation de handicap, cette image corporelle n’est pas stable, ce qui provoque une situation angoissante, qui peut se traduire par des comportements inadaptés : automutilation, masturbation excessive, recherche de l’épuisement par hyper-activité, etc.
  • En dehors de la modulation du tonus, la stabilisation de l’image corporelle n’est possible que si des représentations spatiales se mettent en place, ce qui suppose l’existence de coordinations qui malheureusement font souvent défaut.
  • Le maintien de l’équilibre émotionnel, sans recours à ces représentations, est compliqué, et entraine des conduites caractéristiques. Les stimulations sensorielles ne doivent pas être trop faibles, au risque de voir l’image corporelle s’évanouir. Trop fortes, elles entrainent une décharge motrice importante : l’équilibre est donc difficile à réaliser.
  • Si la personne recherche des stimulations très fortes, elles peuvent s’exprimer par une « auto-mutilation » visant à créer une douleur à la limite du supportable.
  • Tordjman(1995) émet l’hypothèse d’une dépendance de ces personnes pour leurs symptômes auto-mutilateurs : ces conduites entraineraient la sécrétion d’endorphines et le «manque » susciterait la reprise de ces conduites.
  • La réalisation de ces conduites peut alors prendre un caractère compulsif. Ces conduites sont de plus en plus ciblées, elles se rigidifient et prennent une place envahissante dans le fonctionnement du sujet. Dans certains cas, ces comportements peuvent aussi être compris comme une forme de langage.
  • L’ennui peut aussi être une des causes de ce comportement, ainsi que la difficulté à être compris;
  • Les blessures peuvent devenir inquiétantes pour l’entourage, famille et accompagnants, et difficilement supportables !
  • La personne ou l’enfant a un problème visuel qui peut majorer cette difficulté par l’impossibilité d’identifier visuellement l’origine du bruit qui l’inquiète.

QUELQUES PISTES D'ACCOMPAGNEMENT

  • Il faut pouvoir proposer un environnement stable et prédictif pour que ces conduites diminuent.
  • Proposer une source d’intérêt, en veillant à ce que la stimulation ne soit pas trop forte, sinon la conduite resurgit brutalement.
  • Comprendre ce que veut nous dire la personne où l’enfant, ce langage même insupportable est une forme de communication : être attentif au regard, à l’environnement sensoriel (bruits, odeurs, lumière installation).
  • La situation d’apprentissage est peut-être trop compliquée, songer à séquencer pour que ce soit possible. A contrario est-ce que la personne s’ennuie ? Il s’agit alors de capter son attention.
  • Le temps d’attention est restreint : ne pas aller au-delà des limites, laisser un temps de pause et reprendre ensuite.
  • S’assurer qu’il n’y a pas de souffrance physique.
  • Proposer des enveloppements qui, pour certains, seront tactiles (couverture) pour d’autres, sonores (musique) ou encore vestibulaires (hamac, balançoire, fauteuil à bascule), visuelles (lumières douces, fortes, changements de couleurs…).
  • Aménager l’environnement en fonction de chacun : nous ne pouvons pas évaluer ce qui se passe sur le plan psychique, par contre le changement de fonctionnement de la personne nous renseigne sur la portée de notre intervention.

Il est important de rester humble face à ces comportements et d’échanger au maximum avec tous les partenaires y compris la famille. Il n’y a pas une seule vérité, et ce qui semble vrai (solution) un jour ne l’est plus forcément le lendemain. Ce qui peut mettre l’accompagnant en situation d’échec !