Epilepsie

Comment reconnaître une crise d'épilepsie ?

Quelle attitude adopter face à une crise d'épilepsie ?

Quels traitements ?

 

Environ 95 % des enfants porteurs d’un syndrome d’Angelman ont une épilepsie. Les crises d'épilepsie peuvent débuter à tout âge de la vie mais elles surviennent le plus souvent avant 3 ans, se stabilisent en moyenne vers 8-9 ans puis ont tendance à diminuer avec l’âge. L'épilepsie est la première cause d'hospitalisation chez l'enfant.

L'identification des crises d'épilepsie permet un traitement rapide et souvent, le contrôle de l'épilepsie. Environ la moitié des enfants seront équilibrés sous monothérapie, 30 % auront besoin d’une polythérapie. Certains pourront même arrêter leur traitement au bout de quelques années

 

Définition de l’épilepsie

  • La crise d'épilepsie est un dysfonctionnement passager et réversible du cerveau, elle est liée à une décharge électrique soudaine, hypersynchrone d'une population de neurones. Elle se traduit par un épisode clinique bref, à début et fin brusque (paroxystique) qui peut altérer les mouvements, les sensations, la conscience. Les manifestations cliniques sont variables selon la localisation de la décharge électrique et selon sa propagation.
  • L'épilepsie correspond à la répétition des crises d'épilepsie. Dans le syndrome d'Angelman, il s'agit d'une épilepsie syndromique c'est-à-dire qu'elle revêt des caractéristiques communes aux patients porteurs du syndrome d'Angelman.
  • L'état de mal épileptique (EME) est une complication possible, redoutée de l'épilepsie. Il peut survenir chez un patient épileptique connu mais peut également être la première manifestation de la maladie. C'est une urgence médicale nécessitant un traitement rapide et efficace. Sa définition selon la LICE (Ligue Internationale Contre l'Epilepsie) est «une crise épileptique durant plus de 30 minutes ou la survenue de plusieurs crises épileptiques sans restauration de l’état de conscience entre chaque crise pendant trente minutes». D'autres formes d'état de mal épileptique existent, de diagnostic plus difficile.

 

Comment reconnaître les crises d'épilepsie ?

Toutes les formes d'épilepsie peuvent se voir mais les absences atypiques et les myoclonies sont particulièrement fréquentes. Les convulsions fébriles peuvent être les premières manifestations épileptiques du syndrome d'Angelman. La sévérité et le polymorphisme de l'épilepsie sont volontiers associés aux troubles du sommeil.

  • Les convulsions fébriles sont des crises généralisées tonico-cloniques associées à une fièvre supérieure à 38°5 C, quelle que soit l'origine de la fièvre (en dehors des infections cérébro-méningées). Parfois la crise peut se manifester par une hypotonie généralisée ou par une révulsion oculaire associée à des myoclonies (secousses des membres). Les crises généralisées tonico-cloniques se manifestent par une chute brutale puis le corps se raidit avec une élévation des paupières et des globes oculaires (révulsion oculaire): c'est la phase tonique. Apparaissent ensuite des secousses rythmiques de tous les membres: c'est la phase clonique qui peut s'accompagner d'une morsure de la langue. Enfin, la phase post critique qui correspond à la période de récupération avec une hypotonie généralisée, une respiration bruyante et une reprise de conscience progressive. Il peut y avoir une perte d'urines et une respiration bruyante.

 

  • Absences atypiques, crises atoniques et myocloniques

Les absences se caractérisent par une altération brusque de la conscience. L'enfant s’arrête, le regard est figé ou révulsé pendant quelques secondes (5 à 30). Dans le syndrome d'Angelman, les absences sont volontiers associées à des myoclonies c'est-à-dire des secousses musculaires de diagnostic difficile surtout chez le petit enfant. Il faut les rechercher avec attention au niveau des épaules, des bras et des jambes. Elles peuvent entraîner un déséquilibre, une déviation de la tête ou du tronc mais rarement la chute. L'état de mal-absence avec myoclonies peut avoir comme manifestation essentielle un état de régression neurologique. L'enfant devient trop calme, peu actif et paraît absent avec des myoclonies erratiques continues ou très fréquentes qui majorent son ataxie et détériorent son équilibre; ces myoclonies sont parfois difficiles à mettre en évidence et peuvent passer inapercues.

Les crises atoniques, également très brèves, comportent une perte brutale de tonus. Elles peuvent entraîner un fléchissement ou une chute brutale de la tête ou du tronc, parfois des chutes .

Enfin, le myoclonus tremor qui correspond à des myoclonies rapides, intermittentes, d'amplitude fluctuante. Leur origine corticale peut être mise en évidence par des techniques électroencéphalographiques particulières. Ce "tremblement grossier» est très évocateur du syndrome d'Angelman.

 

Quand et pourquoi faire un électroencéphalogramme ?

L’électroencéphalogramme (EEG) de veille et de sommeil enregistre l'activité électrique du cerveau. Dans le syndrome d'Angelman, il précise les anomalies présentes entre les crises (intercritiques ) et pendant les crises d'épilepsie (critiques).

Les anomalies intercritiques sont caractéristiques du syndrome d'Angelman. Leur identification peut aider à évoquer le diagnostic. Il s'agit d'ondes lentes et pointes lentes de grande amplitude, de 4 à 6 cycles par secondes, diffuses et continues qui apparaissent entre 4 et 9 mois et disparaissent généralement après 12 ans. Elles ne sont pas prédictives du risque épileptique et ne sont pas modifiées par la survenue des crises d'épilepsie ou par le traitement.

EEG transmis par le Dr Jérémie Lefranc, CHU Brest)

Les anomalies critiques peuvent être enregistrées notamment dans l'état de mal absence sans convulsion tonicoclonique associée. La vidéo EEG prend ici tout son intérêt car elle peut aider à identifier les myoclonies

Enfin il est essentiel de réaliser un EEG dans les situations de régression neurologique, même lorsqu'aucune myoclonie n'a été identifiée compte tenu du piège diagnostique que représente l'état de mal d'absences myocloniques.

 

Les traitements de l’épilepsie

Traitement d’une crise isolée ou prolongée

Lorsque l’enfant fait une crise convulsive de plus de 5 minutes ou se répétant sur une durée de 15 minutes, un traitement par benzodiazépine peut être nécessaire pour stopper la crise. Si la crise est courte, il n’y en a pas besoin

On utilise essentiellement le Midazolam (Buccolam®) qui se donne par voie intrabuccale. Les doses, variables selon l’âge, sont pré-dosées dans des seringues. Sa prescription est réservée aux médecins hospitaliers. Chez les nourrissons et les jeunes enfants, on peut également utiliser le Diazépam (Valium®), utilisé par voie rectale, comme un suppositoire. La dose est adaptée au poids (0,5 mg/Kg; 1 Ampoule de 2ml = 10 mg; dose maximale 10mg=2 ml). Pour ces deux traitements, une deuxième dose peut être nécessaire, mais elle doit se faire en présence d’un médecin car il y a un risque de pause respiratoire.

Pour les adolescents et les adultes, on préfère parfois donner du Clonazepam (Rivotril®) ou du Diazepam (Valium ®) en gouttes par voie orale, bien que l’efficacité soit moindre, car le Buccolam n’a pas l’AMM chez l’adulte.

 

  1. Médicaments utilisés en traitement de fond

Un traitement de fond est à prendre tous les jours, pour éviter une récidive de crise d’épilepsie. Il est généralement débuté après la première crise dans le syndrome d’Angelman.

Différents traitements antiépileptiques peuvent être proposés, en fonction du type de crise et de l’âge de l’enfant

Plusieurs études ont montré que certains médicaments étaient particulièrement efficaces chez les personnes atteintes du syndrome d’Angelman: le valproate de sodium (Dépakine®, Micropakine®), les benzodiazépines dont le clobazam(Urbanyl®) mais également le clonazépam (Rivotril ®) et le Valium ®, le lévétiracétam (Keppra®). Ils peuvent être associés pour plus d’efficacité. Ils permettent de contrôler environ 80% des crises.

La lamotrigine (Lamictal®), l’éthosuximide (Zarontin®), la gabapentine (Neurontin®) sont réputés moins efficace. Ils sont généralement utilisés en cas de résistance au premier traitement ou de mauvaise tolérance.

Il a, par contre, été rapporté une aggravation, en particulier des myoclonies, sous certains traitements comme la carbamazépine (Tégrétol®), le vigabatrin (Sabril®).

Depuis quelques années, de nombreux nouveaux médicaments sont disponibles. Même si leur efficacité n’a pas fait l’objet d’études spécifiques dans le syndrome d’Angelman, ils peuvent être prescrits par le neurologue ou le neuropédiatre. Ils occasionnent généralement moins d’effets secondaires que les «vieux» médicaments du type phénobarbital (Gardénal®), phénytoine (Dihydan®).

Les traitements antiépileptiques ont parfois des effets secondaires ; il est important de les signaler à votre médecin. Dans la majorité des cas, ils sont transitoires et ne nécessitent pas de modification de traitement.

  • Les modifications du comportement sont les manifestations les plus fréquemment rapportées: fatigue, somnolence, excitation inhabituelle, manifestations d’anxiété ou d’agressivité.
  • Pour les médicaments les plus fréquents:

- Le valproate de sodium peut provoquer des malformations ou des troubles cognitifs chez l’enfant à naitre lors d’une prise pendant la grossesse. C’est dans ce contexte qu’il est désormais nécessaire d’informer (brochure d’information à transmettre) et de faire signer un formulaire d’accord de soins aux parents des filles/femmes chez qui ce traitement est prescrit. On peut observer sous traitement, une prise de poids accrue, une perte de cheveux, en particulier chez les adolescents et adultes. La prise de poids peut être limitée par le contrôle des apports alimentaires, notamment en début de traitement. Les problèmes hépatiques (hépatite aiguë) sont rarissimes. Il n’y a pas à surveiller systématiquement le bilan hépatique.

- Le clonazepam peut accroitre le bavage et l’encombrement pulmonaire.

- La carbamazépine et la lamotrigine peuvent occasionner des éruptions cutanées d’origine allergique justifiant une consultation médicale en urgence.

Pour les enfants et adultes prenant des antiépileptiques au long cours, il faut penser à les supplémenter en vitamine D tous les 4 à 6 mois, en raison du risque accru d’ostéoporose.

 

Diète ou Régime cétogène: traitement non pharmacologique des épilepsies rebelles 

«La» diète ou «le» régime cétogène est un traitement basé sur la mise en place d’un régime alimentaire strict, utilisé si les crises d’épilepsie deviennent résistantes aux traitements usuels, ou en cas d’état de mal épileptique. C’est un traitement efficace puisque 50% des enfants voient leurs crises diminuer et 15 % d’entre eux sont libres de crises.

Plusieurs types de régimes cétogènes existent: le régime cétogène classique, le régime Atkins modifié et plus récemment le régime à faible indice glycémique (Low Glycemic Index). Le principe général est de limiter l’apport de sucre au niveau des neurones afin d’abaisser le seuil épileptogène. Quelquesoit le régime cétogène retenu, il est débuté en milieu hospitalier, nécessite un suivi médical strict et une éducation familiale des règles diététiques.

 

Traitement chirurgical

Il est exceptionnel dans le syndrome d’Angelman. En cas de crises très fréquentes, résistantes aux traitements médicamenteux, on peut poser l’indication d’un stimulateur du nerf vague. Un boîtier ressemblant à un pace maker est implanté dans la paroi thoracique du patient, sous anesthésie générale. Celui-ci envoie des impulsions électriques au nerf vague, qui les transmet au cerveau. Cela peut permettre de diminuer le nombre et la durée des crises.

Une intervention appelée callosotomie peut être proposée pour limiter les chutes violentes de certaines formes d’épilepsie.

 

Traitement de l’état de mal épileptique

Les états de mal myocloniques répondent le plus souvent à un traitement par des benzodiazépines par voie orale (clonazepam: Rivotril®). Un traitement par voie intraveineuse peut être proposé en cas d’échec. Pour les autres types d’état de mal (crises tonico-cloniques, absences atypiques…), une hospitalisation est nécessaire.

 

Prescriptions particulières

Le piracétam (Nootropyl®) ne fait pas partie des anti-épileptiques, mais des psychostimulants. Il est cependant efficace sur les myoclonies corticales. Attention, il n’est remboursé que si le prescripteur précise sur l’ordonnance «traitement des myoclonies d’origine corticale du syndrome d’Angelman»

Le clonazepam (Rivotril®) doit être prescrit sur une ordonnance sécurisée et la posologie doit figurer en toutes lettres. La première ordonnance doit être établie par le pédiatre ou un neurologue. Elle reste valable un an, les renouvellements pouvant être faits par un autre médecin.

 

Traitements et vie quotidienne

Les traitements anti épileptiques sont généralement prescrits pour une durée minimale de 2 ans. Quelques précautions sont nécessaires pour éviter les surdosages, limiter les effets secondaires tout en contrôlant les crises d’épilepsie.

Il est important de donner le traitement régulièrement, en suivant scrupuleusement les dosages prescrits, qui correspondent au poids de votre enfant. Ce dosage doit être revu régulièrement et ajusté au poids. Peu de médicaments nécessitent une surveillance de leur taux par prise de sang en dehors du Valproate de sodium (prise de sang à faire le matin, avant la prise du traitement). Il faut en particulier prévoir un contrôle du dosage si les crises sont plus fréquentes sans explication évidente (maladie intercurrente, oubli de traitement …)

Dans la mesure du possible, le traitement devra être pris à heure fixe, le plus souvent matin et soir. En période de vacances avec des heures de lever et de coucher plus tardives, ou en cas de décalage horaire, il est conseillé de décaler progressivement les horaires de prises du traitement (1h/j).

Il est possible de mélanger les médicaments à l’alimentation froide ou tiède, en veillant à ce que l’ensemble de la dose soit prise. Pour cela, on conseille de les donner dans une petite quantité de nourriture ou de boisson, en début de repas. Si plusieurs médicaments doivent être pris, il est en général possible de les mélanger.

Il faut éviter de donner les médicaments dans le biberon car ils risquent de rester en partie sur les parois ou dans la tétine et donc la dose nécessaire ne sera pas absorbée.

En cas d’oubli, il ne faut pas donner double dose à la prochaine prise, mais rester vigilant sur un risque accru de crise d’épilepsie dans les jours à venir.

Si un patient vomit moins d’1/4 d’heure après avoir pris son traitement, il faut le lui redonner intégralement. Si le vomissement survient plus tard, il ne faut lui redonner que la moitié du traitement ou ne rien lui redonner si l’épisode survient plus à distance.

En cas d’oubli ou de trouble digestif (diarrhée, vomissements), le taux de médicament dans le sang sera moindre et il y a donc un risque de faire des crises. En général cet épisode ne donne pas lieu à un changement de traitement de fond mais peut nécessiter une augmentation transitoire des benzodiazépines par exemple, ou une courte hospitalisation le temps que les choses se stabilisent.

Les modifications importantes et inhabituelles de comportement (hyper excitation ou au contraire état «stuporeux», apathique) peuvent être la conséquence de crises non visibles; les parents sont souvent les premiers à reconnaître ces signes et à pouvoir alerter le médecin. La tenue d’un «carnet de crises» peut également être très utile pour adapter le traitement.

 

par Sylviane Peudenier et Nathalie Dorison, Neuropédiatres

 


Les prises en charge

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