La communication alternative avec le PODD

La communication alternative est un thème important dans la prise en charge des personnes porteuses d'un syndrome d'Angelman. Nos enfants n'ont pas accès au langage oral, ou très peu. Ils ont également des difficultés multiples sur le plan de la motricité, globale ou fine, de la sensorialité, de la vision, des comportements, etc. qu'il faut prendre en compte lorsqu'on souhaite mettre en place un ou des outils de communication alternative. Les personnes porteuses du syndrome d’Angelman ont donc ce qu'on appelle, dans la littérature spécialisée, des "besoins complexes en matière de communication".

Les classeurs de communication PODD

Pour répondre au besoin d'expression de nos enfants, plusieurs choix s'offrent à nous, plusieurs approches. Chaque famille, accompagnée le plus souvent par un ou plusieurs professionnels sur ce parcours, peut ainsi sélectionner ce qui lui paraît le plus approprié pour son enfant, pour sa famille, sachant qu'il n'y a pas "UNE" méthode parfaite, et qu'il est de toute façon important de respecter toutes les formes de communication de nos enfants (vocalisations, désignation, expressions du visage, signes, pictogrammes, etc), c’est ce qu’on appelle la «communication multimodale».

Aux côtés d’autres approches, il en existe une qui nous arrive d’Australie, et qui est de plus en plus proposée aux personnes porteuses du syndrome d'Angelman dans les pays anglophones (Etats-Unis, Australie, Royaume-Uni, Hollande) : il s'agit de classeurs de communication PODD, inventés et élaborés par Gayle Porter, orthophoniste. Ces classeurs ont été à l’origine créés pour les personnes atteintes d'une paralysie cérébrale, mais ils ont été progressivement proposés plus largement aux personnes ayant des troubles de la communication (impossibilité ou difficulté à utiliser le langage oral) associés ou non à d’autres difficultés.

C’est une approche qui peut être proposée aussi bien aux plus jeunes qu’aux adolescents ou adultes porteurs du syndrome d’Angelman. En Australie, une association dédiée au syndrome d’Angelman a mené un projet d’accompagnement dans la mise en place du PODD, et cet outil a été proposé à des personnes porteuses du syndrome, âgées de 18 mois à 40 ans ! Les adultes ont d’ailleurs montré de beaux résultats, si l’on en croit Mary-Louise Bertram (enseignante australienne, spécialisée dans la communication alternative) qui a assuré la mise en œuvre du projet.

Qu’est-ce que le PODD ?

Le PODD signifie littéralement «Tableaux dynamiques à organisation pragmatique». Sous ce nom un peu abstrait se cache en fait un ensemble de grilles de communication à base de pictogrammes, dont le point commun est l’organisation très spécifique du vocabulaire, qui doit permettre à l'enfant de dire "ce qu'il veut, à qui il veut, quand il veut».

L’objectif de cet outil est de permettre à la personne en difficulté de communication d’avoir une communication «autonome», c’est-à-dire d’exprimer ses propres pensées (même si elles sont très simples).

Accéder à une communication autonome nécessite de disposer d’un système de représentation du langage suffisamment élaboré et complet. Beaucoup de mots (pictos) sont contenus dans les classeurs, mais l'organisation spécifique permet d'élaborer des phrases des plus simples aux plus complexes.

Le PODD ne se limite pas à l'expression de ce que l'on veut (faire une demande), mais vise à permettre d'exprimer toutes sortes de messages (dire ce qui ne va pas, donner son opinion : dire ce que l'on aime ou n'aime pas, poser des questions, exprimer ses émotions, etc).

Il existe de nombreuses versions de PODD (ouverture sur 1 page, 2 pages, 2 pages + rabat / accès codés, accès assistés / version électronique, etc). Le choix entre les multiples classeurs se fait après une évaluation des besoins moteurs (motricité fine notamment), visuels, cognitifs mais aussi sensoriels de l’enfant. Puis, au fur et à mesure de ses apprentissages et de l’évolution de son langage, la personne pourra passer d’un classeur à l’autre puisqu’il y a une progression entre les classeurs, en termes de développement du langage.

Quels sont les avantages du PODD ? Pourquoi est-il adapté au Syndrome d’Angelman ?

Le PODD, par sa diversité de types de classeur, s'adapte aux difficultés propres de chaque enfant et offre des stratégies d'accès individualisées.

L'organisation pragmatique permet à l'enfant de communiquer une multiplicité de messages, et pas seulement de construire des phrases du type "je veux.". Pourquoi nos enfants devraient-ils être limités dans leur expression à des demandes ? Ils ont bien plus à nous dire.

Avoir un outil avec davantage de vocabulaire, sous forme de pictogrammes, permet également de lever des ambiguïtés, d’offrir la possibilité de la nuance : par exemple, lorsque l'enfant nous donne une carte "manège", comment savoir ce qu'il nous dit vraiment : "Je veux aller au manège / J'adore les manèges / J'ai vu un manège / Hier, je suis allé faire du manège" ?

Le PODD est un outil visuel qui s'appuie sur la mémoire visuelle de l'enfant, or les personnes avec le syndrome d'Angelman ont souvent de bonnes compétences dans ce champ là.

Le PODD étant utilisé avec un "partenaire", qui tourne les pages et verbalise ce qui se passe, il s'inscrit vraiment dans une interaction et une relation de communication. Nos enfants adorent le contact avec l'autre, et apprécient particulièrement les échanges privilégiés, cet outil semble donc répondre particulièrement à leur mode de fonctionnement.

Quelles sont les difficultés qu’on peut rencontrer ?

La mise en place de cet outil nécessite un réel investissement de la famille. On ne peut nier l’aspect financier, puisqu’il faut se procurer des ressources payantes pour réaliser un PODD, et faire une formation. Cela est particulièrement vrai si la famille entreprend cette mise en place sans l’aide d’un professionnel. Une aide spécifique peut être sollicitée auprès de la MDPH.

Cet outil requiert également un réel investissement de la part de l’entourage dans la mise en place même, puisque le PODD repose sur une approche dite de «stimulation du langage assisté» : pour que l’enfant apprenne à utiliser le PODD, il faut que la famille l’utilise elle-même, car l'enfant apprend en imitant leur modèle. Mais à dire vrai, c'est le cas pour toutes les méthodes de communication alternative : l'enfant n'apprendra jamais à se servir d'un classeur par magie, il faut l'accompagner dans cet apprentissage, le plus possible en milieu naturel et authentique, pour que la communication ne soit pas vue comme un travail, ou une activité guidée par l’adulte, mais comme un outil pour prendre la parole et exprimer ce que l’on veut dire quand on veut le dire.

Mathilde Suc-Mella

Plus d'informations : 

Magali Barthère a traduit une présentation plus complète de l’outil PODD sur le site de l’AFSA: http://www.angelman-afsa.org/fichiers/prasentation-podd-1402058842.pdf

Le magazine Déclic parle de cette approche dans le numéro de novembre 2016 : http://www.magazine-declic.com/

À l'AFSA, Mathilde Suc-Mella, spécialisée dans cette approche PODD, peut également vous apporter plus d'informations : mathilde.mella@gmail.com

Les formations PODD sont aujourd’hui délivrées en France par l’organisme de formation CAApables www.caapables.fr ou ISAAC Francophone : http://www.isaac-fr.org/

Enfin, plusieurs groupes Facebook tournent autour de ce sujet :

  • PODD et syndrome d’Angelman francophone (familles uniquement)
  • PODD francophone (professionnels et familles)
  • PODD and Angelman Syndrome (en anglais, pour les familles uniquement)
  • PODD Europe (en anglais)

Les prises en charge

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