Les apprentissages

Les personnes porteuses du syndrome d’Angelman (SA) présentent des capacités d’apprentissage qui peuvent être développées tout au long de leur vie. Une pédagogie adaptée est nécessaire afin de leur permettre de développer au maximum leurs compétences.

Au regard de la pathologie, de la personnalité de chacun, mais également de l’environnement, il convient de se poser 3 questions :

  • Apprendre quoi, pour quoi faire?
  • Comment?
  • Quand?

Apprendre quoi, pour quoi faire?

  • Pour développer une autonomie dans certains actes de la vie quotidienne.
  • Pour communiquer.
  • Pour développer les capacités intellectuelles.
  • Pour participer à la vie sociale.

Les apprentissages s’effectuent le plus souvent sur le moyen et parfois le long terme. En effet l’ensemble des difficultés liées au syndrome, et particulièrement à la déficience intellectuelle, nécessite de répéter et répéter encore afin d’investir ou réinvestir dans la vie ce qui est appris.

Il est ainsi nécessaire de prioriser les apprentissages utiles dans la vie actuelle et future. Identifier les apprentissages essentiels permet en effet de ne pas s’éparpiller et d’accompagner les personnes de façon plus structurée.

Au fur et à mesure que l’enfant grandit, de nouveaux objectifs apparaissent ou s’inscrivent dans la continuité des premiers.

Voici quelques exemples :

Comment apprendre?

Les personnes atteintes du SA effectuent certains apprentissages seuls, sans intervention d’un tiers, ils utiliseront dans ce cas leurs points forts : L’observation, l’imitation différée, et la ténacité.

Pour d’autres apprentissages, les difficultés et la déficience intellectuelle des personnes atteintes du SA ne leur permettent pas d’apprendre de façon «ordinaire» mais elles peuvent apprendre «autrement».

Il s’agit de leur donner la possibilité d‘imiter, de comprendre, d’intégrer, de mémoriser, et d’utiliser ce qui est appris dans leur vie.

Les personnes ont ainsi accès à de nombreux apprentissages en étant guidées, accompagnées et encouragées. Les professionnels et familles utilisent alors une pédagogie et des stratégies psycho-éducatives adaptées.

Il est plus facile pour chacun d’entre nous d’apprendre lorsque nous éprouvons du plaisir, lorsque l’effort est à la mesure de nos possibilités. Réussir procure une satisfaction, l’entourage peut également procurer une satisfaction en reconnaissant la réussite.

Ainsi, plus les apprentissages seront précis, ciblés et adaptés aux besoins, aux difficultés et aux compétences de la personne, plus les situations de réussite seront nombreuses.

L’apprentissage vers l’autonomie nécessite une motivation. Ce n’est que dans une relation avec l’intéressé, ses proches et les professionnels qui l’accompagnent que cette motivation pourra être identifiée.

Parmi les motivations, convenir communément des priorités pour les apprentissages est essentiel pour ne pas être contre-productif en visant trop d’apprentissages en même temps. Mener des apprentissages avec des stratégies différentes peut se faire au détriment de l’assimilation de l’une d’entre elles.

Les parents sont très bien placés pour connaître les motivations de leur enfant, la communication de leurs observations aux professionnels qui accompagnent leur proche permet autant que possible de convenir des priorités visées concernant l’apprentissage vers l’autonomie.

À tout âge, l’enfant gagne à bénéficier de suivis individuels qui intègrent son contexte de vie. Pour cette raison, il est nécessaire que les parents se mobilisent pour le projet personnalisé, et que les professionnels soient réceptifs à ce que les parents peuvent leur communiquer des réalités de leur enfant dans son contexte. L’enfant a fréquemment une conduite différente à son domicile et dans l’établissement, ou avec les professionnels qui le voient sur une courte durée (30 ou 45 mn).

Évaluer les difficultés rencontrées dans les actes de la vie quotidienne est le point de départ pour accompagner de manière adaptée. Ce travail peut être mené par l’ergothérapeute en CAMSP, en IME ou en libéral, en lien avec les parents et les membres de l’éducative éducative.

Le bilan d’autonomie réalisé par un ergothérapeute comporte toutes les activités de la vie quotidienne du lever jusqu’au coucher : Lever, déplacements, toilette, habillage, repas, courses, activités de loisirs, communication.

À partir des motivations de l’intéressé et de son contexte, des priorités définies, de ses capacités et de ses déficiences dans les actes de la vie quotidienne, des aides techniques peuvent être proposées.

L’autonomie dans la prise des repas peut être facilitée pour certains par une assiette à rebord fixée avec une ventouse : les efforts sont centrés sur les tâches successives : remplir la cuillère d’aliments et la conduire à la bouche mais sans être gêné par la nécessité de maintenir l’assiette.

Le bilan d’autonomie des activités de la vie quotidienne doit être actualisé régulièrement pour que les moyens mis en œuvre par les parents et les membres de l’équipe éducative soient adaptés aux stades d’évolution que traverse la personne.

De façon plus globale, l’accès aux apprentissages est facilité si :

  • L’apprentissage identifié est à la mesure des possibilités de la personne.
  • Les démonstrations sont utilisées. Les enfants atteints du SA aiment être avec les autres, observent beaucoup et peuvent imiter (imitation différée principalement). En s’appuyant sur ces compétences, nous allons privilégier la démonstration, et leur apprendre concrètement «comment faire».
  • La tâche à réaliser est répétée sur le court terme. En exemple, apprendre à porter la cuillère à la bouche. La personne sera encouragée, sollicitée à la plupart des repas pour apprendre non pas à manger entièrement seule, mais à effectuer seule les derniers 5 centimètres qui relient la cuillère à la bouche.
  • La personne est accompagnée à chacune des différentes étapes, dans différents domaines, afin de repérer et soutenir les émergences pour les consolider et les transformer en compétences.
  • Les centres d’intérêts de la personne sont identifiés et utilisés. En exemple, les enfants investissent généralement facilement le visuel, ils aiment regarder les personnes, les situations, les photos, les images. Développer cette capacité, apprendre à regarder de plus en plus finement favorise l’utilisation des supports visuels pour la communication, mais peut également leur permettre d’apprendre à observer, à comparer, raisonner.
  • Les situations d’échec sont limitées au profit des situations de réussite, les moments de plaisir partagé sont multipliés, ce qui encourage naturellement la personne à poursuivre. La confiance en soi est ainsi augmentée et soutient plus facilement l’envie de faire et d’apprendre.
  • Le matériel utilisé est adapté si nécessaire. En exemple, les jeux (type lotos) sont de grande taille, les éléments sont scratchés afin de suppléer aux difficultés motrices.
  • Les apprentissages sont décomposés en séquences. Ils permettent ainsi de mesurer les progrès de l’enfant, de l’adolescent ou encore de l’adulte.
  • La progression pédagogique décomposée est proposée par les professionnels et soutenue par la famille.
  • Les stimuli sont limités afin de favoriser une meilleure attention.
  • L’installation est adaptée afin de diminuer l’agitation motrice.
  • Le matériel et les jeux sont renouvelés, afin d’encourager leur investissement et de limiter les situations d’ennui.
  • Il est proposé de faire et refaire avec de moins en moins d’aide, dans un plaisir partagé.
  • Des rituels sont instaurés, des habitudes de vie, ce qui favorise la répétition des apprentissages en cours et maintient les acquis.
  • Les nouvelles technologies, telles que les tableaux interactifs, les tablettes, ordinateurs, ou smartphones sont utilisés comme un réel outil pédagogique (les logiciels et applications sont nombreux et nécessitent une sélection).
  • Mettre en application ce qui a été appris dans un cadre d’apprentissage au domicile, en séjour adapté, au restaurant etc constitue un incontournable. En exemple : coller des pictogrammes choisis sur une carte postale afin de raconter ses vacances à sa grand-mère puis signer en collant son étiquette prénom.

Les applications dans la vie quotidienne donnent un sens réel aux situations d’apprentissage.

Apprendre quand?

Nous apprenons à tout âge, enfant, adolescent ou adulte. Par ailleurs, un apprentissage proposé à un enfant peut être investi tout de suite ou beaucoup plus tard, voire plusieurs années après, ce qui doit nous encourager à être tenaces et déterminés. Se projeter dans l’avenir dès la petite enfance permet de cibler les apprentissages essentiels, utiles dans la vie.

Et puis il y a la vie, l’entourage, les opportunités, les rencontres qui permettent d’aborder des apprentissages inattendus (ex : apprendre à utiliser un iPod, apprendre à utiliser la nouvelle machine à café). Garder le bon sens et respecter le rythme de chacun permet de proposer des d’apprentissages réalisables.

Ainsi, la multiplication des séances de rééducation peut être contre-productive. De même, le manque de stimulation et de propositions adaptées conduit parfois à l’ennui, à la passivité et à des comportements dits «inadaptés».

L’état général de la personne est à prendre évidemment en compte, afin de ne pas la solliciter lorsqu’elle est fatiguée ou souffrante. La durée des séances doit également tenir compte de ses capacités attentionnelles : une séance de 30 mn peut-être trop longue et nécessiter des adaptations (alterner les compétences mobilisées, proposer des pauses, etc)

La globalité de l'accompagnement est ainsi à prendre en compte et à revoir régulièrement aux différentes périodes de la vie.

Donnons-leur la possibilité de nous étonner !

Pour en savoir plus

Le site Comautrement propose de nombreux exemples de matériel à télécharger. www.comautrement.com

Et les formations et conseils proposés : Comautrement et tms-ergo : www.tms-ergo.fr

Murielle LHEUREUX MAIRE Ergothérapeute, formateur PRAP

Pascale GRACIA, Educatrice spécialisée et formatrice