Psychomotricité

Les personnes atteintes du syndrome d’Angelman (SA) présentent des tableaux différents en fonction entre autres du type d’anomalie génétique responsable de la maladie et de la sévérité de l’épilepsie très fréquemment présente.

Le travail en psychomotricité

Les personnes atteintes du syndrome d’Angelman (SA) présentent des tableaux différents en fonction entre autres du type d’anomalie génétique responsable de la maladie et de la sévérité de l’épilepsie très fréquemment présente.

Pour autant les différents bilans sensorimoteurs d’une dizaine d’enfants porteurs du SA (cf.R.Vasseur) ont mis en évidence, de façon systématique, un retard moteur, une agitation motrice avec des difficultés gestuelles, des troubles de la régulation tonico émotionnelle. On observe généralement une perturbation importante dans le traitement des informations sensorielles, particulièrement dans le domaine tactile, ce qui entraîne une désorganisation sur le plan tonico-moteur, et dans les capacités de manipulation, d’échanges et d’interaction de l’enfant avec son environnement.

Ces différents aspects sont au centre du travail en psychomotricité, qui doit débuter précocement. L’objectif est de permettre aux enfants porteurs du SA de découvrir leur corps, d’être dans le plaisir d’agir, d’expérimenter des manipulations, d’explorer. Le travail sur la proprioception doit permettre de construire une image corporelle plus stable. La psychomotricité s’intègre dans un accompagnement global de l’enfant, pluridisciplinaire et mené en étroit partenariat avec la famille.

L'approche sensorimotrice

L’apport d’André Bullinger sur le développement sensorimoteur nous aide à mieux comprendre le fonctionnement des personnes porteuses du SA, et nous offre des moyens de les accompagner au mieux. Il est essentiel d’avoir en tête les repères chronologiques de ce développement. Où en est l’enfant de ses différentes acquisitions ? Comment s’articulent-elles ? Quels sont les points d’appui, les mises en forme posturales nécessaires à l’enfant pour se réguler sur le plan tonique et avoir des activités de manipulation spatialement orientées ? Comment permettre les changements de posture ? Les déplacements ?

L’approche sensorimotrice proposée par André Bullinger est une approche du développement qui permet de :

  • comprendre comment s'installent certaines conduites à potentiel handicapant.
  • préciser les besoins que ces conduites tendent à satisfaire.
  • identifier les ressources qui pourraient permettre à l’enfant d’abandonner ces conduites. 

Développement de l'enfant

Cette modélisation du développement tente de rendre compte des phénomènes observés. Elle souhaite intégrer les particularités de l’enfant, les ressources du milieu dans lequel il vit, et, dans le temps,  "le niveau et le mode d’instrumentation et de subjectivation qui résultent des processus en jeu.  Sa spécificité est d’éclairer la période pré-instrumentale du développement" (A.BULLINGER) : il tente ainsi de décrire comment se précisent les différentes fonctions instrumentales du corps (activités orales, conduites de communication, praxies, sphinctérisation, locomotion, etc) en même temps que l'enfant se découvre comme un 'objet' en relation spatialisée avec d'autres objets et personnes.

Le développement est considéré comme dépendant des flux sensoriels que l’enfant trouve dans son milieu, des mises en forme corporelles que son entourage lui procure, des fluctuations tonico-émotionnelles dont son organisme est le siège. L’installation de comportements symptomatiques est comprise comme l’effet d’un processus adaptif. L'identification des besoins qu'ils visent à satisfaire rend possible des ajustements de l'entourage et des aménagements physiques du milieu dont on attend la diminution des symptômes ou leur prévention.

Le Bilan Sensori Moteur (BSM)

Issu de cette approche et réalisé avec l’aide de la famille, le Bilan Sensori Moteur (BSM) fait désormais partie des outils d’évaluation proposés par de nombreux praticiens. Ce bilan est axé sur les compétences manifestes et potentielles. Il permet de situer la personne dans une dynamique développementale et d'indexer sa progression. Cet outil est complémentaire des outils traditionnels d’évaluation clinique.

Cette démarche permet de conserver un point de vue global et intégré sur les besoins de l’enfant qui se multiplient dans tous les domaines avec le temps. Son application ne nécessite pas de matériel particulier, mais fait appel à un usage différent des objets et des personnes de l’environnement habituel du sujet, ainsi qu’à l’observation de son comportement.

De cette observation émergent des pistes susceptibles d'étayer les conduites de l'enfant, que ce soit en psychomotricité ou avec les autres professionnels qui s'occupent de l'enfant, à l'école, dans l’institution, et bien sûr à la maison. Mises en place précocement, les interventions qui en sont issues permettent de limiter voire d’éviter l’installation d’un déficit ou d’un trouble, dès lors que les facteurs de risque ont été identifiés. 

Catherine Langlois psychomotricienne CAMSP APAJH Haute-Savoie.

En complément :

«LE MUR LE PLUS HAUT EST RAREMENT ASSEZ LONG POUR NE PAS ÊTRE CONTOURNÉ!» Luc Langlois, Pédiatre.

*ANDRE BULLINGER, 2004 Le développement sensori moteur de l’enfant et ses avatars. Un parcours de recherche (tome 1) Ed.erès.Coll.La vie de l’enfant

*ROGER VASSEUR .PIERRE DELION, 2010 Périodes sensibles dans le développement psychomoteur de l’enfant de 0 à 3 ans.

*Association des praticiens du bilan sensori moteur. asso.prat.bsm@gmail.com

Association ABSM 25 Villa Santos Dumont 75015 PARIS

Le cas de Lissandre

LISSANDRE, petit garçon né le 8/02/2006, deuxième enfant d’unefratriede trois. Sondiagnostic de syndrome d’Angelman est posé à 16 mois (délétion).

À 9 mois, Lissandre est très agité, toujours en recherche d'équilibre, il présente des tremblements importants, des gestes brusques et peu organisés.

Lissandreest dépassé par le monde qui l'entoure : les différentes stimulations qui l'atteignent peuvent au départ être agréables, mais il se désorganise rapidement, comme s’il ne pouvait pas filtrer ce trop-plein de stimulations. Il se présente comme s'il n'avait pas de protection : les tremblements redoublent, les cris sont fréquents, la position en extension l’empêche alors de se stabiliser.

Dans ce cas, André Bullinger évoque une hypersensibilité, qui peut être tactile, auditive ou visuelle. Les troubles de la régulation tonico-émotionnelle sont majeurs.

Mise en place d'un traitement

À partir de ces constats, nous avons essayé avec les parents de Lissandre de réfléchir aux points d'appui, aux moyens de l’aider à s'approprier les outils de son milieu :

  • Un travail important sur les changements de posture a été mené, afin d'amener Lissandre à construire un axe autour duquel il serait plus stable, pour l’amener vers la station assise, lui permettre de supporter les changements de position, et d’en devenir ainsi l'initiateur.
  • L'idée était d’offrir à Lissandre la possibilité d’acquérir un tonus plus harmonieux, par des mises en forme du corps et la proposition de contenants. Ce travail a été réalisé en étroit partenariat avec le kinésithérapeute. Lissandre a progressivement pu intégrer ses appuis et nous amener, parents et professionnels, à des objectifs sans cesse renouvelés.

Les progrès réalisés sur le plan postural ont permis à Lissandre une meilleure régulation émotionnelle, moins de pleurs, des rires, des répétitions de situations agréables. Le travail d'auto-désensibilisation permet aujourd'hui à Lissandre des explorations d'objets différentes, en les portant moins à la bouche, avec de nouvelles coordinations !

L'hypersensibilité deLissandre

On observe actuellement une hypersensibilité tactile importante au niveau des membres inférieurs. Quand l’enfant est en position assise, il se porte rapidement en extension et le tronc présente une inflexion scoliotiqueà convexité droite, les appuis se font préférentiellement sur la droite (observations R.Vasseur). Ses troubles de la posture sont déterminés, entre autres, par la position de l’adulte dans son espace.

Son problème majeur semble le traitement tactile des informations, sur lequel se répercutent toutes les modificationsenvironnementales.

L’agitation est très importante, comme habituellement dans ce syndrome. La particularité pour Lissandre est que cette agitation est rapidement calmée par les caresses de sa maman. L’amélioration est instantanée, et lui permet de progresser sur le plan des coordinations manuelles et de la posture.

Lissandre réagit très fort sur le plan émotionnel, ce qui perturbe d’emblée le traitement des informations tactiles et encore plus sa posture.

L’installation sur une chaise avec un plot antérieur, avec si possible un contact abdominal, lui a été bénéfique.

Les solutions apportées dans ce cas

Au travers de cette observation, il apparaît donc très important d’être attentif aux mises en forme corporelle et à tous les appuis donnés pour permettre aux enfants d’agir, comme :

  • Les situations d’enroulement, de regroupement qui permettent la connaissance du corps.
  • L’installation assis à table, la proposition de jeux sur les côtés, autorisant les postures asymétriques, pour favoriser la dissociation des mains et les manipulations.

Il s’agit bien sûr de quelques exemples, chaque enfant restant unique, chaque projet thérapeutique devant être réalisé sur mesure et sans cesse réévalué.

Dans le cas de Lissandre, la balnéothérapie a été proposée, parallèlement aux séances de psychomotricité en salle, en présence de l’un de ses parents. Cet accompagnement a favorisé des progrès sur le plan moteur ainsi qu’une régulation tonico-émotionnelle de meilleure qualité.

Nous remercions Rebecca et Mario, ses parents, pour l’autorisation de présenter leur enfant, ainsi que pour les photos.


Les prises en charge

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